MADELEINE DE MAILLY COMTESSE DE ROYE
Issue de l'une des premières maisons de France, Louise de Montmorency avait épousé, en 1505, un gentilhomme d'une grande famille de Picardie, Ferry II de Mailly, baron de Conty, chambellan du roi, capitaine de cent hommes d'armes de ses ordonnances, et sénéchal d'Anjou. De son union avec lui étaient nés, les 28 avril 1508 et 13 septembre 1509, deux enfants, Jean et Louise de Mailly.
Ferry de Mailly, alors qu'il se signalait, à côté de Bayard, sur les champs de bataille d'Italie, avait reçu une blessure mortelle et était décédé près de Milan, en décembre 1511, laissant sa veuve enceinte d'un troisième enfant, auquel elle donna le jour, le 16 juin 1512. Cet enfant était Madeleine de Mailly.
Louise de Montmorency épousa en secondes noces Gaspard, premier du nom, comte de Coligny, seigneur de Châtillon-sur Loing, connu dans l'histoire sous le nom de maréchal de Châtillon. De cette nouvelle union naquirent quatre fils, Pierre, Odet, Gaspard, François. Le maréchal de Châtillon mourut le 4 août 1522.
vLe 27 août 1528, à l'âge de seize ans, Madeleine de Mailly épousa le comte Charles de Roye, qui n'avait que trois ans de plus qu'elle. Elle alla se fixer avec lui au centre de ses diverses seigneuries de Roye, de Muret, de Buzancy, de Nisy le-Comte, d'Aulnay, de Pierrepont et de Coulommiers.
De son mariage avec Charles de Roye naquirent deux filles, Eléonore et Charlotte, qui devinrent, l'une, princesse de Condé, l'autre, comtesse de La Rochefoucault. Charles de Roye, à peine âgé de quarante-trois ans, mourut, au château de Plessis, le 29 janvier 1552.
Si sa courte carrière n'a laissé que peu de traces dans l'histoire, on sait du moins qu'elle fut honorable.
Nommé, dès sa jeunesse, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, il devint plus tard vidame de Laon, et porta dignement, dans sa vie publique, de même que dans sa vie privée, le nom recommandable qu'il tenait de ses ancêtres.
Il était réservé à Madeleine de Mailly, héritière de ce nom conjointement avec ses filles, d'en rehausser l'éclat, par le rôle considérable qu'elle joua, depuis son veuvage, dans les principaux événements d'une époque agitée, et de s'élever, en qualité de comtesse de Roye, au rang des grandes personnalités historiques du seizième siècle. Eléonore et Charlotte devaient aussi concourir largement au soutien du nom que leur avait légué leur père
La supériorité d'esprit et de cœur s'alliait, chez la comtesse de Roye, à un zèle soutenu pour la cause de l'Evangile qu'elle avait adopté de bonne heure. Elle se signala notamment, en 1559, par son intervention en faveur des réformés, près de la reine mère très-défavorablement prévenue contre eux.
Elle ne craignit pas de lui dire en cette circonstance : « Il est facile d'imputer toutes sortes de crimes à des gens qui ne peuvent se défendre. Si la reine connaissait mieux ceux dont il s'agit, et la cause en question, elle en jugerait tout autrement. » Témoin des efforts de Madame de Roye, François de Morel écrivait, le 11 septembre 1559, à Calvin: «Madame de Roye, une de tes compatriotes, est une véritable héroïne. » L'année suivante, lors de l'arrestation et de la captivité à Orléans, du prince de Condé, son gendre, elle déploya le plus beau caractère. Brutalement arrachée de son château d'Anisy et enfermée dans celui de Saint-Germain en Laye, elle ne consentit à en sortir, après la mort de François II, que sous la réserve expresse du droit d'exercer, ainsi que le prince de Condé, un recours en déclaration d'innocence.
Le parlement, à la barre duquel elle comparut, la vengea dans son honneur, par un arrêt du 13 juin 1561, qui la déclara « pure et innocente des cas à elle imposés ; son recours luy estant réservé contre qui il appartiendrai t pour telle réparation que la qua lité de sa personne requéroit. » Justice fut ainsi faite du prétendu crime de lèse-majesté divine dont on l'avait accusée, uniquement à raison de sa franche adhésion à la religion réformée. Revenue à la cour, en 1561, la comtesse de Roye s'y montra non moins fidèle que par le passé à ses convictions religieuses. De sympathiques hommages, de puissants encouragements vinrent du dehors fortifier l'attitude chrétienne qu'elle y avait prise. Quelles paroles, entre tant d'autres, que celles que lui adressa Calvin en insistant sur sa piété et sur le courageux exemple qu'elle sut donner à ses filles ! « Madame, lui écrivait-il, le 24 septembre 1561, j'ay bien oc casion de glorifier Dieu de la grande vertu qu'il a mise en vous pour advancer le règne denostre Seigneur Jésus-Christ, en faisant protestation franche et pure de suivre la vérité de l'Evangile, en la vie et en la mort, comme c'est toute nostre félicité que d'estre disciples de ce grand maistre et subjects de ce souverain roy qui nous a esté envoyé du ciel pour nous retirer de perdition à l'espérance du salut éternel qu'il nous a acquis... Il y a encores un aultre bénéfice de surcroist, que tant Madame la princesse que Madame sa sœur, vos filles, vous tiennent compagnie à tendre et aspirer au droit but de nostre vie, s'adonnant d'un commun accord et se desdiant à l'obéissance de la pure vérité. » Il n'est pas jusqu'à l'impression produite par Madame de Roye et par l'aînée de ses filles sur de simples étrangers, en passage à Saint-Germain, le 21 novembre 1561, qu'il ne soit intéressant de constater. « Nous fûmes (racontent les théologiens palatins et wurtembergeois, qui arrivèrent après la clôture du colloque de Poissy), reçus par la princesse de Condé : son accueil fut des plus aimables. Elle nous fit part de ses vives préoccupations et de ses vœux ardents pour l'extension de la piété chrétienne dans les âmes, nous exhortant à y concourir par des efforts soutenus. Ce qu'elle savait de l'étendue de ceux auxquels se livrait Frédéric III, la portait à désirer qu'il fût informé des prières qu'elle adressait au ciel en sa faveur. Nous vîmes, en même temps que la princesse, Madame de Roye, sa mère, femme d’une rare piété et d’un noble caractère, qui, depuis bien des années, professe la religion évangélique, dans les voies de laquelle elle a attiré ses filles, son gendre et plusieurs autres personnes. Sa conviction et son zèle motivèrent récemment, sous François II, son in carcération. Douée d'une éloquence réelle et d'un grand amour pour la vraie religion, cette noble dame nous a parlé avec entraînement des sentiments qui l'animent. » A peu de temps de là, lorsque éclata la première guerre de religion, et que la princesse de Condé alla, accompagnée de son fils aîné seul, rejoindre, à travers mille dangers, Louis de Bourbon à Orléans, Madame de Roye resta en Picardie avec ses petits enfants, encore en bas âge. Bientôt vint le moment où Eléonore de Roye et son mari, voyant l'orage s'amonceler sur la tête de ces frêles créatures et de leur aïeule, s'efforcèrent de les soustraire à ses atteintes, en mettant un terme à leur séjour devenu chaque jour plus dangereux dans une province menacée de terribles agitations. Ils mandèrent donc à la comtesse de Roye, pour sa sécurité, qu'elle se retirât en Allemagne, où elle pouvait beaucoup servir, avec ses petits enfants, à savoir : François leur fils puîné, âgé d'environ sept ans, les deux frères jumeaux dont la princesse etait accouchée au mois d'avril précédent, et Mademoiselle de Bourbon ; ce qu'elle fit; en se dirigeant sur Strasbourg.
D'Andelot avait devancé sa sœur sur le sol étranger. Dès le 17 juillet 1562, on l'avait vu traverser la principale cité de l'Alsace, alors qu'il se rendait près des princes protestants d'Allemagne. Ses démarches auprès d'eux avaient été, en quelques jours, couronnées d'un premier succès; car Hotman, qui correspondait avec lui, de Strasbourg, où il résidait pour les affaires du prince de Condé, écrivait, le 8 août, à l'avoyer de Berne : « Desjà monseigneur d’Andelot à trouvé telle faveur, qu'il a promesse de trois mil reistres pour le moins et de quatre mil lanskenets, qui s'assemblent maintenant au païs de Hessen, près Cassel. » D'Andelot, de son côté, dans une lettre expédiée, le 21 août, de Cassel, à Hotman, lui faisait part de son espoir de procéder, le 18 septembre, à la monstre des troupes allemandes dont il opérait la levée. En quittant la Picardie avec les enfants de sa fille, la comtesse de Roye ne s'était pas fait illusion sur la longueur et les difficultés du trajet qu'elle entreprenait à travers la France. Le 20 août, on s'étonnait, à Strasbourg, de ne pas la voir déjà arrivée. Th. de Bèze, appelé dans cette ville, durant une mission à remplir en Allemagne et en Suisse, s'inquiétait à cette date, du défaut de nouvelles récentes de la noble voyageuse. Le 29 août, le crédule cardinal de Bourbon, se disant bien informé, prétendait que « Madame de Roye es toit allée à Strasbourg mener ses petits nepveux en ostaige pour avoir gens ; qu'ils y avoient esté reffusez, et qu'elle s'en estoit revenue. » Ce qui est certain, c'est que, dans les derniers jours d'août, Madame de Roye atteignit enfin sa destination. Là, un accueil sympathique lui était réservé, ainsi qu'aux intéressantes et débiles créatures confiées à ses soins, dont Calvin caractérisait la condition, alors si précaire, par ces touchantes paroles adressées à leur grand'mère ; « Dieu, Madame, a honoré vos petits-enfants, en les faisant pellerins en terre estrange. » Dès le 9 septembre 1562, d'Andeîot remerciait, en ces termes, de l'accueil fait à sa sœur : « Messieurs les consuls et seigneurs du principal conseil de Strasbourg Messieurs ayant esté adverty par Madame de Roye, ma sœur, du bon et gracieux accueil que vous avez faict et à elle et à Messieurs ses petits enffans, à son arrivée à vostre ville de Strasbourg, je; n'ay voulu faillir de vous en mercier bien affectueusement, tant pour le regard de Monsieur le prince de Condé, père des dits enffans, que particullièrement au nom de Mr l'amyral, mon frère, et au mien ; vous pouvant asseurer que la mémoire d'une telle honnesteté et courtoysye demeurera tellement imprimée en noz espritz que, si Dieu nous faict la grâce de venir au but de noz affaires, nous ne perdrons jamais occasion de le recognoistre en vostre endroict, » etc., etc. La comtesse de Roye, au moment de son arrivée, se trouvait réduite par la rigueur des circonstances à un état voisin du dénuement. Les premières ressources nécessaires lui furent spontanément fournies par un généreux ami des protestants français, par le vénérable Jean Sturm, recteur de Strasbourg, qui, plus d'une fois encore, vint à son aide Fidèle à la double mission qu'elle avait à remplir dans sa nouvelle résidence, la comtesse sut, tout en s'occupant avec sollicitude de ses petits-enfants, saisir habilement chaque occasion qui s'offrait à elle de servir les intérêts de la cause au service de laquelle se consacraient avec tant d'ardeur ses frères, sa fille et son gendre. Et d'abord, pour justifier la prise d'armes de Condé, elle produisit les originaux mêmes des lettres que Catherine de Médicis avait adressées, en mars 1562, à ce prince, originaux que ce dernier avait confiés à sa belle-mère, en la priant de les tenir à la disposition de Spifame, afin qu'il les utilisât officiellement en temps et lieu. Spifame, en effet, ne manqua pas de s'en prévaloir, dans une circonstance solennelle, ainsi que l'atteste le passage suivant de la harangue qu'il adressa à Ferdinand Ier, lorsque se tint la diète de Francfort : « Du commandement que la reine a fait à Monsieur le prince de Condé de prendre les armes pour la liberté,du roy et la sienne, outre ce que dessus, ily a témoignage de plusieurs chevaliers... Aussi il y en a lettres... lesquelles sont pardevers mondit sieur le prince, qui n'a voulu les hasarder au danger des chemins, mais nous a recommandé, Sire, recouvrer de Madame de Roye, sa belle-mère, estant avec messieurs ses enfans à Stras bourg, quatre lettres escrites et signées de sa main, que nous exhibons, Sire, à vostre sacrée majesté. » La production des lettres de Catherine de Médicis fut suivie, à Strasbourg et ailleurs, de démarches actives de Madame de Roye en faveur de la cause protestante. Ce fut ainsi qu'elle appuya près de Sturm, dont le dévouement et l'abnégation lui étaient bien connus, les demandes de secours que présentèrent, l'un après l'autre, en septembre, le prince de Portien et d'Andelot, alors aux prises, tous deux, avec de sérieuses difficultés pour la solde des levées allemandes. Ce fut ainsi, en outre, qu'elle entra, par correspondance, en relation avec plusieurs princes allemands. Ce fut ainsi encore, qu'à quelque temps de là, elle se rendit, en compagnie de Jean Sturm, près du duc de Wurtemberg, du margrave de Bade et de l'électeur palatin, Frédéric III, pour rechercher leur appui en faveur des chefs de ses coreligionnaires; qu'après avoir conféré avec chacun de ces princes, elle entretint leur zèle par l'envoi de nombreuses lettres ; et qu'elle stimula même, à diverses reprises, celui d'Elisabeth, reine d'Angleterre. Il suffira de consulter trois lettres adressées par la comtesse au duc de Wurtemberg, en octobre et novembre 1562, alors que d'Andelot se préparait à entreprendre et accomplissait avec sa petite armée une marche hardie à travers les provinces de France, pour avoir une idée de l'énergie avec laquelle la mère de la princesse de Condé, la sœur des Châtillon plaidait, devant certaines cours étrangères, la cause des chefs du protestantisme français, en reconnaissant les services déjà rendus par ces cours aux courageux défenseurs de la liberté religieuse, en faveur desquels elle ne cessait d'intercéder. Vers la fin de l'année 1562, l'insuccès d'un mouvement agressif sur Paris et ses environs, la rupture des négocia tions qui en avaient paralysé les effets, la marche de Condé dans la direction de la Normandie, celle des troupes catholiques, qui s'avançaient parallèlement aux siennes : tout faisait présager, comme inévitable, une sanglante rencontre des deux armées. Arrivés dans le voisinage de Dreux, Condé et ses lieutenants jugèrent opportun avant d'en venir aux mains, avec l'ennemi, d'adresser, en vue d'éventualités prochaines, un nouvel appel au bon vouloir de leurs auxiliaires étrangers. L'étendue de leur confiance dans le zèle et l'habileté de l'intermédiaire qu'ils se décidaient à employer près de ceux-ci ressort clairement de la teneur du mandat dont ils l'investi rent ; et, circonstance digne de remarque, cet intermédiaire fut non pas un homme rompu aux négociations, mais une femme éminente qui, par la double autorité de son caractère et de son expérience, offrait toutes les garanties désirables à des commettants tels que Condé, Coligny, d'Andelot, de La Rochefoucauld, Jean de Eoban, de Grammont et le prince de Portien. Un fait de cette nature donne un intérêt exceptionnel au texte des pouvoirs que ces divers chefs, réunis au camp de Néron, conférèrent, le 18 décembre 1562, à la mère de la princesse de Condé. Lorsque intervint la paix d'Amboise, en 1563, la comtesse de Roye se fût empressée de rentrer en France avec ses petits enfants, si elle n'eût été convaincue que la prolongation de son séjour à l'étranger pouvait être utile à la cause protes tante, qu'elle n'avait cessé de servir. Sa fille et son gendre partageant sa conviction à cet égard, elle différa son départ, et consacra deux mois et demi à l'accomplissement de diverses démarches près des princes protestants de l'Allemagne, dont sa correspondance et la leur contiennent des traces intéressantes. On a su que, dès son arrivée à Strasbourg, elle était entrée en relations directes avec ces princes et avec la reine d'Angleterre, pour stimuler leur sympathie en faveur des réformés français, et obtenir des envois de secours. Ajoutons qu'elle avait, en maintes conjonctures, soigneusement cherché à consolider ces relations, et que, pour y parvenir, elle s'était pré value avec avantage des pleins pouvoirs que les chefs de l'armée protestante lui avaient conférés, la veille de la bataille de Dreux. Depuis la captivité de son gendre, elle avait adjuré Elisabeth et Cécil de s'associer aux efforts par lesquels elle tendait à relever les affaires des réformés français, et elle avait imploré l'appui de la reine et de son ministre, « pour l'amour de Dieu et par pitié pour le bon prince (Condé) qui était prisonnier . » Placée à proximité des princes allemands, elle les avait ponctuellement tenus au courant de ce qui se passait en France, en alliant toujours de chaleureuses exhortations aux renseignements très-précis qu'elle leur transmettait. Quand la comtesse de Roye fut définitivement fixée sur la conclusion et les conditions de la paix qui lui permettait de rentrer en France, elle ne jugea pas sa mission terminée. Les principaux motifs qui la déterminèrent à différer son départ furent :
1- le désir de se concerter avec les princes protestants d'Allemagne sur la direction des affaires religieuses en France, et sur une entente à établir entre les Eglises protestantes des deux pays;
2- le soin de préparer les voies à l'adoption d'un projet d'alliance entre la cour de France et les princes protestants d'Allemagne;
3- l'intention de recourir à l'intervention de ces princes près de la reine d'Angleterre pour la décider à restituer le Havre à la France. A la détermination ainsi prise par la comtesse de Roye correspondit l'activité qu'elle déploya dans l'exécution, et dont les documents fournissent d'incontestables preuves.
D'après une note rédigée et signée par elle, on peut se faire une idée de la mission complémentaire qu'elle s'était assignée depuis la paix. Le jour venu, où elle se considéra comme touchant au terme de sa mission et comme n'ayant plus qu'à adresser des adieux, elle exprima au duc de Wurtemberg le désir de le voir, « voulant lui dire de bouche et communiquer beaucoup d'affaires qui importaient à l'advancement de la gloire de Dieu, bien et repoz de toute la chrestienté. » Le duc s'empressa d'accéder à son désir, en lui proposant même d'aller à sa rencontre dans une localité déterminée. Sur ces entrefaites, la comtesse de Roye fit au duc de Deux-Ponts, le 5 mai, une visite, à la suite de laquelle elle écrivit, le 7 mai, au landgrave de Hesse et au duc de Wurtemberg, pour se ménager définitivement une entrevue avec eux.
Le même jour, 7 mai, elle annonça de Strasbourg, à Théodore de Bèze, que sa visite au duc de Deux-Ponts l'avait « grandement satisfaite ; » que le duc de Wurtemberg l'avait assurée qu'il serait bien aise de la voir; et qu'elle comptait, après s'être entretenue avec lui, ainsi qu'avec le landgrave de Hesse, et s'acheminer en France, où elle n'épargnerait rien de ce qu'elle connaissaient pouvoir servir pour l'avancement de la gloire de Dieu, Le 20 mai, la comtesse de Roye arriva à Heidelberg, où elle visita l'électeur palatin, Frédéric III, et rencontra le land grave Philippe. A côté des graves entretiens qu'elle eut avec ces deux princes sur les affaires religieuses et politiques du moment, se plaça une invitation adressée à Frédéric III, de vouloir bien procurer, soit au prince de Condé, soit à elle même, un portrait de la fille aînée du roi Maximilien, pour complaire à Catherine de Médicis, qui avait entamé des pour parlers de mariage entre son fils Charles IX et la jeune princesse. Le 22 mai, la comtesse se rendit à Brucksall, où, après avoir communiqué au duc de Wurtemberg les dernières nouvelles qu'elle avait reçues de France, elle eut avec lui un entretien approfondi sur des sujets exclusivement religieux. Revenue à Strasbourg, Madame de Roye n'y résida que peu de jours, et reprit enfin le chemin de la France avec ses petits-enfants. Le 8 juin, elle était à Nancy, d'où elle écrivit au duc de Wurtemberg1 ; et, vers le milieu du même mois, elle arriva à la cour, où elle eut la joie de remettre intact, à la princesse, sa fille, le précieux dépôt que celle-ci lui avait confié. Elle mourut quatre ans après (1567), à la veille de la seconde guerre civile qu'elle avait tout fait pour prévenir. Le simple exposé qui précède n'a d'autre but que de faciliter l'intelligence de quelques-uns des faits consignés dans les lettres et documents inédits qui suivent, lesquels se rat tachent au séjour de la comtesse de Roye à Strasbourg-, dans e cours des années 1562 et 1563.
Comte Jules Delaborde